Faut-il ouvrir un PEL en 2023 ?

Pendant la baisse quasi-continue des taux immobiliers entre 2009 et 2021, le taux de prêt proposé par les différentes générations de PEL était toujours moins intéressant que les taux des prêts « classiques » accordés par les banques.

Ainsi, ces dernières années, le PEL ne pouvait servir que pour sa 2ème utilité : le rendement offert. C’était en fait uniquement vrai sur les PEL « anciennes générations », car, pour la génération « 2017 à 2022 », le rendement ne dépassait pas les 1% brut.  

Avec la forte remontée des taux immobiliers, il est légitime de se poser la question d’ouvrir un PEL en 2023 dont le taux de prêt est de 3,2%.

A la suite de la hausse des taux de marchés en 2022, les niveaux de taux d’épargne et de taux de prêt du PEL ont été relevé de 1%. La nouvelle génération de PEL présente donc les niveaux suivants :

  • Taux d’épargne : 2% brut, soit 1,40% net après application de la flat tax (30%)
  • Taux de prêt : 3,20%

En outre :

  • Concernant la mise en place d’un prêt :
    • Il faut conserver le PEL au moins 4 ans pour bénéficier d’un prêt
    • Le montant du prêt dépend des droits à prêt acquis (voir plus bas) et est plafonné à 92 000 €
    • La durée de prêt ne peut être comprise qu’entre 2 et 15 ans
  • Concernant les versements :
    • Il faut verser au minimum 540 €/an
    • Le plafond des versements est de 61 200 €
    • Après 10 ans, il n’est plus possible de faire de versements mais le PEL continuera de produire des intérêts pendant 5 ans

Calcul du montant maximum du prêt

Avant de rentrer dans ce calcul qu’on peut qualifier d’« usine à gaz », rappelons que le prêt sera de toute façon plafonné à 92 000 €.  

On peut décomposer ce calcul en 3 étapes :

Etape 1 : Déterminer les droits à prêt.

Ceux-ci sont indiqués dans les relevés annuels mais si l’on souhaite faire une projection pour une date donnée, il faut savoir comment les calculer : Il s’agit des intérêts générés par le taux d’épargne (le rendement brut). Il faut également avoir en tête que les intérêts cumulés sont versés le 31 décembre et subissent un prélèvement de 30%.

Prenons un exemple simple pour comprendre le calcul des droits à prêt :

  • Hypothèses :
    • 10 000 € ont été versés le 1er janvier 2023 sur un PEL « génération 2023 et après »
    • Un versement unique de 1000 € est effectué la dernière semaine de chaque année
  • Droits à prêt cumulés en 2023 :
    • 10 000 x 2% = 200
  • Droits à prêt cumulés en 2024 :
    • Il faut d’abord calculer le montant du PEL pendant l’année 2024 :
      • Versement initial : 10 000
      • Intérêts nets cumulés en 2023 : 200 x (1-30%) = 140
      • Versement annuel : 1 000
      • TOTAL : 11 140
    • 11 140 x 2% = 223

Et ainsi de suite. Il n’y a plus qu’à sommer les droits à prêt cumulés sur les différentes années. Précisons également qu’on ne cumule plus de droits à prêt après la 10ème année du PEL.

Le site MoneyVox propose un simulateur très pratique pour calculer les droits à prêt avec des versements mensuels : https://www.moneyvox.fr/calculatrice/placement/plan-epargne-logement.php

Etape 2 : Multiplier par 2,5 ces droits à prêt.

Dans le cas d’un emprunt pour un achat de SCPI, le coefficient est moins avantageux : 1,5.

On obtient alors un total d’intérêts.

Etape 3 : A partir de ce montant total d’intérêts, du nombre d’années choisi pour l’emprunt (entre 2 et 15 ans) et du taux d’emprunt, on va pouvoir déterminer le montant maximum empruntable (plafonné à 92 000 €).

Mais attention, là où on pourrait croire que le taux d’emprunt à utiliser pour le calcul est le taux de prêt du PEL (3,2% pour les PEL ouverts en 2023), c’est en fait le taux d’épargne qu’il faut utiliser (2% pour les PEL ouverts en 2023) !

Et pour ne rien simplifier, étant donné que les taux de PEL sont des taux actuariels, il faut les convertir en taux nominaux pour les comparer à des taux immobiliers classiques. Ainsi 2% de taux d’épargne actuariel donne 1,982% (arrondi) en taux nominal. 

En utilisant un simulateur classique d’emprunt immobilier comme par exemple : https://somopconseil.fr/outils/emprunt-mensualite-interets/, on pourra alors déterminer par tâtonnement le montant empruntable en faisant correspondre le total des intérêts de l’emprunt au nombre trouvé après avoir multiplié par 2,5.

Exemple :

Avec 1 000 € de droits à prêts, on obtient 2 500 € de montant total d’intérêts. A l’aide d’un simulateur de prêt et en choisissant un taux de 1,982% et une durée de 15 ans, le montant maximum empruntable sera de 15 942 €.

Vous pouvez utiliser ce second simulateur de MoneyVox qui vous donnera directement les montants maximums de prêt à partir des droits à prêt acquis : https://www.moneyvox.fr/calculatrice/credit/droit-pret-pel.php       

A-t-on intérêt à ouvrir un PEL en 2023 ? Exemple de simulation

La question à se poser : le taux d’emprunt plus faible du PEL par rapport à un prêt classique va-t-il compenser le manque à gagner à bloquer son argent sur son PEL ?

Le plus simple est de raisonner avec une simulation.

Il faut néanmoins faire des choix pour les hypothèses de la simulation :  

  • Epargne disponible avant la décision : 25 000 €
  • On souhaite que l’effort de trésorerie soit le plus faible => versement de 45 €/mois
  • On souhaite pouvoir utiliser le plus vite possible le prêt : 4 ans de versements (c’est le minimum pour le PEL)
  • On souhaite avoir les mensualités les plus faibles possibles => Emprunt sur 15 ans

Nous avons donc 2 stratégies :

  • Stratégie 1: Verser les 25 000 € sur un PEL et obtenir le « prêt PEL » à 3,2% sur 15 ans
    • En appliquant la méthode du paragraphe précédent, on obtient :
      • Droits à prêt : 2 128 €
      • Taux actuariel de 2% => Taux nominal de 1,982% (arrondi)
      • Montant maximum du prêt : 33 925 €
  • Stratégie 2: Verser les 25 000 € sur un autre support et obtenir dans 4 ans un prêt « classique » au taux du marché
    • Concernant le support choisi: nous faisons ici un choix simple pour la simulation : une combinaison du Livret A et du LDDS rapportant 3% net de fiscalité. Avec un horizon de placement de 4 ans (cf hypothèse ci-dessus) pour constituer un apport immobilier, il y a bien sûr d’autres alternatives : fonds en euros performant, fonds obligataire à échéance…   
    • Concernant le taux du marché dans 4 ans d’un prêt « classique » d’une durée de 15 ans : personne ne le connaît. En revanche, on peut déjà simuler au taux actuel de marché (3,6%) pour se placer dans le cas où les taux seraient au même niveau dans 4 ans

On calcule donc pour les 2 stratégies :

  • Les intérêts nets perçus pendant les 4 ans d’épargne pour un versement initial de 25 000 € et des versements mensuels de 45 €
  • Les intérêts payés pendant les 15 ans de prêt pour un montant emprunté de 33 925 €

Résultats Stratégie 1 :

  • Intérêts nets perçus pendant l’épargne : 1 490 €
  • Intérêts payés pendant le prêt (taux actuariel de 3,2% donne un taux nominal de 3,154%) : 8 699 €

Résultats Stratégie 2 :

  • Intérêts nets perçus pendant l’épargne : 3 268 €
  • Intérêts payés pendant le prêt (taux nominal de 3,6%) : 10 030 €

Dans cette simulation, la stratégie 2 l’emporte : + 447 € (=3268 – 10030 – (1490 – 8699)).

Il ne s’agit que d’une seule simulation mais cela permet d’avoir une idée du raisonnement à adopter.

Arguments contre l’ouverture d’un PEL en 2023

1) Tout d’abord, on peut voir que le montant maximum empruntable avec le PEL est relativement faible par rapport à la somme bloquée (dans la simulation : 33 925 € avec un versement initial de 25 000 €). Et en faisant un versement initial plus conséquent, il ne faut pas oublier que le montant de prêt du PEL sera de toute façon plafonné à 92 000 €. Dans de nombreux cas d’achat immobilier, l’emprunt ne sera pas assez important pour le projet.

2) Si les taux immobiliers sur 15 ans sont plus élevés dans 4 ans qu’actuellement, la stratégie 1 (utiliser le PEL) pourrait s’avérer plus intéressante mais les projections des économistes pour les prochaines années ne poussent dans ce sens.

Et voici encore d’autres arguments en faveur de la 2ème stratégie :    

3) Dans de nombreux cas, les emprunts ne vont pas jusqu’à leur échéance car l’emprunteur revend son bien avant. Ainsi, le gain sur les intérêts de l’emprunt de la stratégie 1 sera moins important que dans la simulation.

4) Si pendant la phase de prêt, les taux immobiliers baissent, on peut renégocier son taux sur un prêt classique, faisant diminuer les intérêts payés dans la stratégie 2.

5) L’argent placé sur la combinaison Livret A/LDDS n’est pas bloqué à la différence du PEL. Si le rendement de ces livrets venait à baisser dans les 4 prochaines années, les taux immobiliers de marché seraient très probablement à nouveau plus intéressants que le taux du PEL 2023.

6) On peut tenter de placer l’épargne initiale à des rendements potentiellement plus importants que 3% net de fiscalité (par exemple par un investissement en actions) pour augmenter les intérêts nets perçus pendant la phase d’épargne. Néanmoins, ce choix s’accompagnera d’un risque de perte en capital.

7) Enfin, la mise en place du « prêt PEL » auprès des banques peut s’avérer nettement plus compliquée qu’un prêt « classique ».

En conclusion, dans les conditions actuelles et compte tenu de l’ensemble des arguments cités ci-dessus, l’ouverture d’un PEL « génération 2023 » ne semble pas pertinent